Alors que la Commune laisse les citoyens se débrouiller avec la neige qui s’accumule sur les trottoirs, elle a un ministère de la Fée des dents.
Fin novembre, il a fallu prendre rendez-vous avec un dentiste pour Marie. À ce moment-là, je ne croyais pas avoir à me frotter d’aussi près à la lourdeur de l’État-providence. J’ai demandé à une amie le nom de son dentiste, en espérant que celui-ci accepte de nous prendre. Or, ce n’est pas si simple.
Les frais dentaires pour les enfants sont couverts par l’assurance-maladie danoise, mais on ne peut pas aller voir le dentiste que l’on veut. Croyant qu’on m’en assignerait un (comme c’est le cas avec le médecin), je suis allée à la Commune pour demander les coordonnés de MON dentiste. On m’a alors informé que les dentistes pour enfants relèvent des écoles. Il fallait donc voir avec l’école de Marie. Dans le cas de l’école française, on ne pouvait pas me dire si ça fonctionnait de la même façon.
Je me suis renseignée auprès d’une secrétaire qui m’a référée à sa collègue qui est au bureau trois jours par semaine selon des plages horaires très précises...
J’ai donc décidé de retourner à la Commune. On m’a donné un petit numéro et on m’a fait attendre quelques minutes avant qu’une employée chargée des services sociaux m’amène dans son bureau. Après l’explication de mon cas, elle a fouillé dans son grand ordinateur pour finalement me donner un numéro de téléphone. Il s’agissait des coordonnées du service responsable de la santé dentaire des enfants au ministère de la Santé.
Je suis repartie avec mon petit papier. La dame que j’ai eu au bout du fil m’a donné un autre numéro de téléphone...
Je croyais qu’il s’agissait d’un autre service du ministère. Je réexplique la situation. En donnant le numéro de CPR (le code qui ouvre toutes les portes du système public) de Marie, la dame me dit, qu’elle vient de m’envoyer une convocation à un rendez-vous pour Louis-Philippe. Je n’y comprends plus rien. Où est-ce que je suis? Comment elle sait le nom de mon fils? Avec un tel prénom, aucun Danois ne peut l’imaginer. Je lui réexplique que c’est pour Marie que je veux un rendez-vous. Elle m’assure qu’elle a compris, mais que tous les enfants de deux ans reçoivent une convocation chez le dentiste. Elle me donne finalement un rendez-vous pour Marie. C’est à ce moment que je comprends que je suis à la clinique dentaire. Enfin!
Quelques jours plus tard, arrive le carton concernant le rendez-vous de Louis-Philippe. Les deux enfants ont rendez-vous dans la même semaine, mais pas en même temps... Heureusement que j’ai téléphoné pour Marie, sinon je n’aurais rien compris à cette carte postale.
À la date convenue pour le rendez-vous de Marie, je me rends chez le dentiste dont le bureau est situé au sous-sol d’une énorme école primaire à l’autre bout du quartier. Marie manque un après-midi d’école puisque celle-ci est située à l’autre bout de la ville. En me voyant, la secrétaire m’explique que le rendez-vous est annulé. Elle a essayé de m’avertir, mais elle avait oublié de prendre mon numéro de téléphone.
C’est en retournant à la maison en autobus que je me suis fait voler mon portefeuille...
Deux jours plus tard, je refais le périple avec Louis-Philippe. Je croyais qu’il s’agissait d’un examen dentaire, mais c’était davantage un bilan de santé. Le but de ce rendez-vous est d’établir un contact avec les parents et de leur donner des conseils sur la santé buccale de leur enfant. La sympathique technicienne tente de son mieux de me traduire en anglais les questions. J’étais un peu gênée d’utiliser des fonds publics pour un tel rendez-vous alors que nous restons ici seulement pour quelques mois encore.
Louis-Philippe est maintenant fiché au ministère de la Fée des dents. Comme un numéro de CPR est valide à vie, si un jour Louis-Philippe revient vivre au Danemark, on saura que son père a une prémolaire de bébé...
Quant à Marie, c’est le fait que ses dents d’adultes poussent derrière ses dents de lait sans que celles-ci tombent qui avait déclenché tout ce branle-bas. Lorsqu’on a finalement vu la dentiste, elle a dit d’attendre! La petite dent finira bien par tomber! Marie est donc ressortie très déçue de ce rendez-vous manqué avec la Fée des dents. Un mois plus tard, il semble que ce ne soit plus qu’une question de temps!
Avant cet épisode, j’avais l’impression qu’il n’y avait pas de cliniques dentaires dans notre quartier. Maintenant que je sais que « tand » signifie dent, je constate qu’il y en a plusieurs près de chez-nous et une à côté de l’école de Marie... mais il fallait aller voir la clinique que la Fée des dents a choisi pour nous. Elle a probablement adopté une gestion par quartier!
Dans le même système de santé, mon amie sortira de l’hôpital dans les deux heures suivant son accouchement, restrictions budgétaires obligent! C’est probablement qu’on manque de lits d’hôpitaux, mais pas de bureaucrates!! (Avec une pareille réflexion, est-ce que le vent de droite qui souffle sur l’Europe serait en train de m’atteindre???)
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